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> [Question de]. H. Bergasse, Le tocsin de la décadence. In: Question de n°11, Mars-Avril 1976. p.113 (Bibliothèque)
La réflexion sur l’Histoire est l’une des composantes essentielles de la civilisation occidentale : on sait qu’elle fait presque entièrement défaut aux Orientaux. Peut-être même peut-on dire que cet acharnement à vouloir déchiffrer les « leçons du passé » est caractéristique de notre culture et, en un sens, la fonde. D’Hérodote à Arnold J. Toynbee, les Européens n’ont cessé d’interroger le passé afin d’expliquer le présent et, dans la mesure du possible, de construire l’avenir. Il ne serait sans doute pas difficile de montrer que telle ou telle entreprise nationale s’est faite par référence consciente à un modèle historique auquel on s’efforçait de rendre vie : Frédéric Barberousse et Napoléon Bonaparte n’ont-ils pas, l’un et l’autre, tenté de recréer les empires d’Auguste et de Charlemagne ? La référence à Rome est d’ailleurs, on le sait, l’une des plus fréquentes dans les ouvrages où s’élabore cette philosophie de l’Histoire que le XIXe siècle a portée à son plein développement. L’essai d’Henry Bergasse s’inscrit donc dans une longue tradition qui va de Montesquieu (Sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence) à Louis Rougier (Le conflit du christianisme primitif et de la civilisation antique), en passant par Nietzsche, Spengler et tant d’autres. Il leur ressemble d’ailleurs dans son refus de présenter un récit exhaustif des événements qui marquèrent la fin de la puissance romaine : ce qui l’intéresse, ce qui retient son attention, c’est l’analyse des causes possibles de cette surprenante décadence. Comment comprendre, en effet, que cette nation qui paraissait sans rivale ait pu disparaître sous les coups d’ennemis notoirement inférieurs ? Les invasions germaniques, d’ailleurs échelonnées dans le temps, ne firent pas courir à l’Empire un danger plus grand que les guerres contre Carthage, par exemple. Et les Gaulois n’avaient-ils pas conquis l’Italie quelques siècles auparavant ? Mais le « Malheur aux vaincus ! » du chef celte n’avait pas seulement humilié les Romains : il leur avait surtout inspiré un désir de vengeance qui lui permit de rétablir bientôt la situation. Au temps de la République, les dangers et les échecs stimulaient l’ardeur militaire des Latins et conduisaient les légions à réaliser des prouesses extraordinaires. Quel contraste entre la campagne de César aboutissant à la conquête de la Gaule tout entière et l'incapacité des empereurs du IIe siècle de contenir les Barbares aux frontières ! Mais constater le fait n’est pas l’expliquer, et Henry Bergasse passe en revue les causes possibles de cette décadence de la puissance romaine : l’immensité de l’Empire (à une époque où il fallait trente jours de navigation par beau temps pour aller d’Espagne en Grèce), les dépenses énormes que l’Etat devait consentir pour entretenir l’armée et l’administration, l’absence d’une loi claire pour la désignation des empereurs, l’abandon de la spécificité romaine (par le don du titre de citoyen à tous les étrangers), etc. Pourtant, il est bien évident qu’il faut chercher plus loin, car quelques réformes eussent suffi à pallier ces inconvénients. Si elles ne furent pas proposées, c’est sans doute parce que manquait l’essentiel : le désir de survivre, la force de lutter, l’esprit national. « Vaincue par ses conquêtes », la Rome impériale s’abandonne au luxe, à l’oisiveté. Pour plus de confort, les familles réduisent le nombre de leurs enfants et s’habituent à déléguer leurs pouvoirs à des esclaves affranchis. On esquive le service militaire, et les légions se « barbarisent ». Les cultes orientaux supplantent progressivement la religion nationale centrée sur le culte de la déesse Rome. A cet égard, on ne doit pas oublier que les premiers chrétiens ont joué un rôle décisif en entretenant dans la population un esprit contestataire qui ruina l’autorité de l’Etat ; Tertullien n’affirmait-il pas, en 197 : « Rien ne nous est plus étranger que l’intérêt public ? » Ne conseillait-il pas aux adeptes de la religion nouvelle de « lutter contre les institutions ancestrales, l’autorité des traditions, les lois », etc.? La tentative de « récupération » que fit Constantin au IVe siècle survenait bien tard et elle fut sans lendemain, peut-être parce que la jeune Eglise préférait les petits royaumes indépendants où l’influence des évêques se ferait plus aisément sentir (baptême de Clovis en 506). Bien entendu, il est tentant de lire l’histoire récente de l’Occident à la lumière de celle de l’Empire romain : n’avons-nous pas connu, nous aussi, de terribles guerres fratricides à l’issue desquelles la puissance coloniale des Anglais et des Français (pour ne citer que ceux-là) s’est évanouie ? Serions-nous capables, le cas échéant, de trouver en nous les ressources spirituelles nécessaires pour protéger notre civilisation ? Henry Bergasse se garde bien de prophétiser — et il a raison —, mais il nous invite, en conclusion de son beau livre, à méditer sur cette idée qui sous-tend tout son essai : « Le vrai danger que courent les nations civilisées réside moins dans l’audace de leurs adversaires que dans leur propre aveulissement. » — J.V.
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Paris. Les Belles Lettres. 1976, 220 p.
… (mer)
 
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Joop-le-philosophe | Jul 19, 2019 |

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